GEOPOWEB

L’INFLUENCE : FORMES TRADITIONNELLES, FORMES NOUVELLES, MÊMES MÉCANISMES. Claude REVEL

GEOPOWEB, LIRE LE MONDE EN TROIS DIMENSIONS (Géopolitique, Géoéconomie, Philosophie politique). Fragmentation et mondialisation « à front renversé », politiques d’endiguement, lois extraterritoriales, guerres hybrides et économiques, stratégies d’influence informationnelle et numérique, Gigafactories et entreprises stratégiques, sécurité économique et souveraineté...

HISTOIRE D’UNE RÉSILIENCE. Recension : Japon, l’envol vers la modernité, ouvrage de P.A. Donnet

LA RUSSIE A-T-ELLE LES MOYENS DE VAINCRE EN 2024 ? Michel FOUQUIN

LE POUVOIR DE LA MONNAIE AU SERVICE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOCIALE. ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC JÉZABEL COUPPEY-SOUBEYRAN, PIERRE DELANDRE, AUGUSTIN SERSIRON

JACQUES DELORS, L’EUROPEEN. Par Jean-Marc SIROËN

LE GEOINT MARITIME, NOUVEL ENJEU DE CONNAISSANCE ET DE PUISSANCE. Philippe BOULANGER

INTERDÉPENDANCE ASYMÉTRIQUE ET GEOECONOMICS. Risque géopolitique et politique des sanctions

LA RÉSILIENCE : UN RÉCIT PROGRESSISTE DE SUBSTITUTION FACE AUX MULTIPLES CHOCS DE LA POSTMODERNITÉ. Baptiste RAPPIN

VERS DES ÉCHANGES D’ÉNERGIE « ENTRE AMIS » ? Anna CRETI et Patrice GEOFFRON

LA FIN DE LA SECONDE MONDIALISATION LIBÉRALE ? Michel FOUQUIN

DE LA FRAGMENTATION À L’INSTALLATION D’UN « DÉSORDRE » MONDIAL (I)

DE LA FRAGMENTATION À L’INSTALLATION D’UN « DÉSORDRE » MONDIAL (II)

DÉMOCRATIE et MONDE GLOBALISÉ. À propos de la « Grande Expérience » de Yascha Mounk

LE PACTE VERT, L’ AGRICULTURE ET L’ « EFFET BRUXELLES » A L’ÉPREUVE DU XXIÈME SIECLE. A. DI MAMBRO et M. RAFFRAY

ART ET DÉNONCIATION POLITIQUE : LE CAS DE LA RDA. Elisa GOUDIN-STEINMANN

RÉINDUSTRIALISATION ET DÉCARBONATION, QUID DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ? Sophie BOUTILLIER

ET SI LE RETOUR DE L’INFLATION ÉTAIT UN ÉVÈNEMENT GÉOPOLITIQUE ? Sylvie MATELLY

LES NEUTRES OPPORTUNISTES ONT EMERGÉ. Thomas Flichy de la Neuville

LE GROUPE DE BLOOMSBURY ET LA GUERRE. CONVICTIONS ET CONTRADICTIONS. Par Jean-Marc SIROËN

LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE, AVENIR DE L’INDUSTRIE ? Par Nadine LEVRATTO

« LA GUERRE DES PUISSANTS »

« ENTRE IGNORANCE ORGANISÉE ET RÉSILIENCE, LA GESTION DE LA CATASTROPHE NUCLÉAIRE DE FUKUSHIMA PAR LA RESPONSABILISATION DES VICTIMES ». Alexandre VAUVEL

UKRAINE. « IL FAUDRAIT PROCÉDER À UNE REFONTE DES TRAITÉS QUI RÉGULENT LA SÉCURITE EUROPÉENNE »

DE LA SOCIÉTÉ POST-INDUSTRIELLE À LA SOCIÉTÉ HYPER-INDUSTRIELLE. LA RÉHABILITATION DE LA SOUVERAINETÉ ÉCONOMIQUE. Par Arnaud PAUTET

NE PAS SE SOUMETTRE À L’HISTOIRE. IMPRESSIONS DE « DÉJA VU »

LA MONDIALISATION A ENGENDRÉ UNE CONFLICTUALITÉ PERMANENTE. Par Raphaël CHAUVANCY

ÉTHIQUE NUMERIQUE ET POSTMODERNITÉ. Par Michel MAFFESOLI

UNE MONDIALISATION À FRONT RENVERSÉ

LES DESSOUS GÉOPOLITIQUES DU MANAGEMENT. Par Baptiste RAPPIN

LE COVID-19 S’ENGAGE DANS LA GUERRE MONDIALE DES VALEURS. Par J.P. Betbeze

LE MULTILATERALISME EN QUESTION. Par Philippe MOCELLIN

« LE VRAI COUPABLE, C’EST NOUS » !

VIVE L’INCOMMUNICATION. Par Dominique WOLTON

LES SENTIERS DE LA GUERRE ECONOMIQUE. Par NICOLAS MOINET

LES FUTURS POSSIBLES DE LA COOPERATION FRANCO-ALLEMANDE. Claire DEMESMAY

GEOPOLITIQUE DE LA PROTECTION SOCIALE. Julien DAMON

L’ACTUALITE DE KARL POLANYI. Par Nadjib ABDELKADER

« LE MONDE D’AUJOURD’HUI ET LE MONDE D’APRES ». Extraits de JEAN FOURASTIE

VERS UNE CONCEPTION RENOUVELÉE DU BIEN COMMUN. Par F. FLAHAULT

« POUR TIRER LES LEÇONS DE LA CRISE, IL NOUS FAUT PRODUIRE MOINS ET MIEUX ». Par Th. SCHAUDER

AVEUGLEMENTS STRATEGIQUES et RESILIENCE

Mondialisation, Etats, organisations, relations interpersonnelles : QUELS EXERCICES DISCURSIFS DU POUVOIR ? O. DUPONT

LE CAPITALISME et ses RYTHMES, QUATRE SIECLES EN PERSPECTIVE. Par Pierre Dockès

NATION et REPUBLIQUE, ALLERS-RETOURS. Par Gil DELANNOI

L’INDIVIDU MONDIALISE. Du local au global

LE DEFI DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE par N. Moinet

De la MONDIALISATION « heureuse » à la MONDIALISATION « chute des masques »

MYTHE ET REALITE DE LA SOCIETE ENTREPRENEURIALE. L’entrepreneur, « l’homme à tout faire du capitalisme » ? Par Sophie Boutillier

Lectures GEOPOLITIQUES et GEOECONOMIQUES

DEUX THEORIES DU POPULISME

QUAND le SUD REINVENTE le MONDE. Par Bertrand BADIE

L’ETAT-NATION N’EST NI UN BIEN NI UN MAL EN SOI". Par Gil Delannoi

LA MONDIALISATION et LA SOUVERAINETE sont-elles CONTRADICTOIRES ?

SOLIDARITE STRATEGIQUE et POLITIQUES D’ETAT. Par C. Harbulot et D. Julienne

La gouvernance mondiale existe déjà… UN DIALOGUE CRITIQUE AVEC B. BADIE

LA LITTERATURE FAIT-ELLE DE LA GEOPOLITIQUE ?

PENSER LA GUERRE AVEC CLAUSEWITZ ?

L’expression GUERRE ECONOMIQUE est-elle satisfaisante ?

LA GEOPOLITIQUE et ses DERIVES

A propos d´un billet de Thomas Piketty

Conférence de Bertrand Badie : Les embarras de la puissance (9 février 2014)

Conférence de Bertrand Badie : L’humiliation : une pathologie des relations internationales (6 novembre 2014)

LE RETOUR DES NATIONS... ET DE L’EUROPE ?

jeudi 15 octobre 2020 Patrick LALLEMANT

Le constat est désormais bien établi. Après la « mondialisation heureuse » dans laquelle disparaitraient les identités nationales pour laisser la place au marché (outil de pacification des moeurs, assorti de la démocratie libérale), voilà (re)venu le temps des nations d’où que l’on regarde : Brexit, pays européens nationalistes, montée des régimes autoritaires (Russie, Turquie, Chine etc...). Après la désagrégation de l’espace post-soviétique des années 90 (toujours en cours), d’aucuns parlent aujourd’hui de désoccidentalisation du monde... voire d’un retour des empires d’hier construit sur les identités historiques, le religieux etc... Toujours est-il que le nouveau nationalisme de repli est souvent identitaire en donnant « une clôture » à la nation (B. Badie). Ce mouvement est porteur de nouvelles conflictualités.

Dans cette observation rapide, on peut relever deux grandes logiques. Celle de l’U.E qui se construit contractuellement sur le commerce et le Droit (critères de Copenhague) versus des pays dont la Realpolitik ne comprend que les rapports de force et font peu de cas des droits individuels. Les outils du hard power and soft power s’incarnent dans la course à l’innovation, la guerre technologique, la cyberguerre, les enjeux du digital, la course aux armements, en particulier entre les deux grands candidats au leadership mondial. La crise sanitaire et les exigences nouvelles de la sécurité nationale réhabilitent aussi un pouvoir central fort et autoritaire, la nécessité d’une politique industrielle basée sur le temps long et non le simple court-termisme du marché.

Mais qui est responsable de cette décomposition, de ce nouveau basculement du monde ? Les gouvernements occidentaux depuis la fin de la guerre froide, ont poussé les feux d’un capitalisme sans régulation et sans partage des fruits de la croissance (le cas américain est extrême). Il a fonctionné comme un véritable bulldozer arasant les classes moyennes voire populaires : un chemin rapide vers une désolidarisation des élites nationales, de la perte de confiance dans la parole des politiques, du populisme. Ce dernier, dont on a souvent évoqué les menaces de façon parfois pathétique, aurait nécessité beaucoup plus d’attention portée à ses causes. Dans ce constat se trouvait déjà la rupture potentielle entre les élites et « les gens qui se lèvent tôt »... Avions nous oublié que la période gaulliste (obédience dont se targuent rapidement nos hommes politiques) était une synthèse entre le marché et l’économie, un contrat social ? Elle s’incarnait sous forme d’une politique industrielle forte et dans un partage des fruits de la croissance. Dans le cadre européen, le schéma s’est compliqué encore avec la nécessité de répondre aux décisions de Bruxelles, au désir d’atténuer les frontières nationales pour achever le Grand Marché etc... La désagrégation inachevée de l’espace soviétique (cf Biélorussie, Haut-Karabakh) et la fin de la Fédération yougoslave participent à ce mouvement depuis la chute du Mur. La mondialisation est alors inclusive de « toutes les nations du monde » mais excluante pour certaines couches de la population...

Les conséquences de ces bouleversements sont majeures. On a une certaine tribalisation du monde, avec la crise des grandes Institutions Internationales, le recul des gardes fous, des règles internationales de droit (voir par exemple la contestation des frontières). « Vous avez aimé » la géopolitique des masques, vous préférerez la course au vaccin national - à moins qu’il soit entretemps devenu un bien commun mondial. Le retour des nations - qui ne dit rien à priori sur son essence (positive ou négative) - se constitue aujourd’hui souvent comme une tentative de « réhabilitation des empires d’hier » à travers au minimum les stratégies d’influence, le regroupement de territoires « amis » et de son étranger proche. Même les organisations les plus élaborées sont travaillées de l’intérieur. On connaît les pays européens qui essaient de s’affranchir des évolutions sociétales communes et ne respectent pas les exigences démocratiques. On suivra l’application de l’attribution des ressources financières pour la relance en lien avec le respect des règles de droit.

La nouveauté, c’est aussi que l’ancienne puissance hégémonique, dans une course au leadership mondial, participe à la désagrégation du système international construit dans l’après-guerre, voire au mieux se retire dans un isolationnisme dangereux (cf l’affaire de la Turquie et de l’OTAN). On notera également les tensions sur l’élection au Conseil des droits de l’homme de l’ONU (CDH), auquel ne participe plus les Etats-Unis depuis 2018.

On peut reprocher beaucoup de choses aux Institutions Internationales : lourdeur, coût de financement et inefficacité, y compris souvent leur tropisme occidental, mais elles ont constitué un utile référentiel (type Droits de l’homme) et donc une utopie créatrice, préférable aux logiques régressives. La multipolarité s’incarne aujourd’hui en partie dans le néo-nationalisme.

L’U.E se trouve dans un choix difficile et un nouvel équilibre à trouver. Elle doit rompre avec la naïveté et le tropisme du marché, financier en particulier, grand ordonnateur des ressources. Le marché pur et parfait, ce « grand seigneur » qui récompenserait les meilleurs, la compétitivité, l’attractivité... La relance verte, la mutualisation des dettes, la remobilisation des citoyens européens pour l’avenir de l’Union, constituent l’amorce d’un nouveau projet collectif. Les autorités européennes semblent l’avoir compris. Mais le plus dur reste à venir : une volonté politique durable pour engager ce nouveau projet dans le contexte des 27 pays aux exigences et égoïsmes nationaux. C’est d’abord dépasser la gouvernance de « type uniquement Maastricht » (cf échec en 2005 du projet de Constitution européenne), au moment où les enjeux sont de plus en plus transnationaux (climat, question sanitaire, évitement fiscal, cyberguerre). Le rôle majeur demeure dans les mains du couple franco-allemand, Mme Merkel affiche « son retour » vers l’Europe.

Réhabiliter la puissance publique, faire participer plus les acteurs privés au bien commun y compris fiscalement, c’est autre chose que de favoriser sans cesse la baisse des prélèvements obligatoires au nom de l’attractivité, limitant ce faisant les ressources pour l’Etat. La complémentarité privé/publique peut s’incarner dans un nouveau contrat social. C’est toute une interrogation sur les objectifs et les moyens pour une génération entière : type de consommation et mode de vie, nouveau régime de croissance plus sobre et durable, réhabilitation des territoires et du local. Une véritable politique stratégique en termes de relocalisations, une position géopolitique commune avec les pays membres sont incontournables. C’est en somme une politique de souveraineté économique conciliable avec l’intégration européenne...

En résumé un consensus urgent sur ce que doit être l’Europe de demain.

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