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LA RUSSIE A-T-ELLE LES MOYENS DE VAINCRE EN 2024 ? Michel FOUQUIN

LE POUVOIR DE LA MONNAIE AU SERVICE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET SOCIALE. ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC JÉZABEL COUPPEY-SOUBEYRAN, PIERRE DELANDRE, AUGUSTIN SERSIRON

GEOPOWEB, LIRE LE MONDE EN TROIS DIMENSIONS (Géopolitique, Géoéconomie, Philosophie politique). Mondialisation « à front renversé » : politiques d’endiguement, lois extraterritoriales, guerres hybrides, sécurité stratégique...

JACQUES DELORS, L’EUROPEEN. Par Jean-Marc SIROËN

LE GEOINT MARITIME, NOUVEL ENJEU DE CONNAISSANCE ET DE PUISSANCE. Philippe BOULANGER

INTERDÉPENDANCE ASYMÉTRIQUE ET GEOECONOMICS. Risque géopolitique et politique des sanctions

LA RÉSILIENCE : UN RÉCIT PROGRESSISTE DE SUBSTITUTION FACE AUX MULTIPLES CHOCS DE LA POSTMODERNITÉ. Baptiste RAPPIN

VERS DES ÉCHANGES D’ÉNERGIE « ENTRE AMIS » ? Anna CRETI et Patrice GEOFFRON

LA FIN DE LA SECONDE MONDIALISATION LIBÉRALE ? Michel FOUQUIN

DE LA FRAGMENTATION À L’INSTALLATION D’UN « DÉSORDRE » MONDIAL (I)

DE LA FRAGMENTATION À L’INSTALLATION D’UN « DÉSORDRE » MONDIAL (II)

DÉMOCRATIE et MONDE GLOBALISÉ. À propos de la « Grande Expérience » de Yascha Mounk

LE PACTE VERT, L’ AGRICULTURE ET L’ « EFFET BRUXELLES » A L’ÉPREUVE DU XXIÈME SIECLE. A. DI MAMBRO et M. RAFFRAY

ART ET DÉNONCIATION POLITIQUE : LE CAS DE LA RDA. Elisa GOUDIN-STEINMANN

RÉINDUSTRIALISATION ET DÉCARBONATION, QUID DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ? Sophie BOUTILLIER

ET SI LE RETOUR DE L’INFLATION ÉTAIT UN ÉVÈNEMENT GÉOPOLITIQUE ? Sylvie MATELLY

LES NEUTRES OPPORTUNISTES ONT EMERGÉ. Thomas Flichy de la Neuville

LE GROUPE DE BLOOMSBURY ET LA GUERRE. CONVICTIONS ET CONTRADICTIONS. Par Jean-Marc SIROËN

LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE, AVENIR DE L’INDUSTRIE ? Par Nadine LEVRATTO

« LA GUERRE DES PUISSANTS »

« ENTRE IGNORANCE ORGANISÉE ET RÉSILIENCE, LA GESTION DE LA CATASTROPHE NUCLÉAIRE DE FUKUSHIMA PAR LA RESPONSABILISATION DES VICTIMES ». Alexandre VAUVEL

DE LA SOCIÉTÉ POST-INDUSTRIELLE À LA SOCIÉTÉ HYPER-INDUSTRIELLE. LA RÉHABILITATION DE LA SOUVERAINETÉ ÉCONOMIQUE. Par Arnaud PAUTET

NE PAS SE SOUMETTRE À L’HISTOIRE. IMPRESSIONS DE « DÉJA VU »

LA MONDIALISATION A ENGENDRÉ UNE CONFLICTUALITÉ PERMANENTE. Par Raphaël CHAUVANCY

ÉTHIQUE NUMERIQUE ET POSTMODERNITÉ. Par Michel MAFFESOLI

UNE MONDIALISATION À FRONT RENVERSÉ

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LE COVID-19 S’ENGAGE DANS LA GUERRE MONDIALE DES VALEURS. Par J.P. Betbeze

LE MULTILATERALISME EN QUESTION. Par Philippe MOCELLIN

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LES SENTIERS DE LA GUERRE ECONOMIQUE. Par NICOLAS MOINET

LE RETOUR DES NATIONS... ET DE L’EUROPE ?

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L’ACTUALITE DE KARL POLANYI. Par Nadjib ABDELKADER

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VERS UNE CONCEPTION RENOUVELÉE DU BIEN COMMUN. Par F. FLAHAULT

« POUR TIRER LES LEÇONS DE LA CRISE, IL NOUS FAUT PRODUIRE MOINS ET MIEUX ». Par Th. SCHAUDER

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Mondialisation, Etats, organisations, relations interpersonnelles : QUELS EXERCICES DISCURSIFS DU POUVOIR ? O. DUPONT

LE CAPITALISME et ses RYTHMES, QUATRE SIECLES EN PERSPECTIVE. Par Pierre Dockès

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L’INDIVIDU MONDIALISE. Du local au global

LE DEFI DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE par N. Moinet

De la MONDIALISATION « heureuse » à la MONDIALISATION « chute des masques »

MYTHE ET REALITE DE LA SOCIETE ENTREPRENEURIALE. L’entrepreneur, « l’homme à tout faire du capitalisme » ? Par Sophie Boutillier

Lectures GEOPOLITIQUES et GEOECONOMIQUES

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L’ETAT-NATION N’EST NI UN BIEN NI UN MAL EN SOI". Par Gil Delannoi

LA MONDIALISATION et LA SOUVERAINETE sont-elles CONTRADICTOIRES ?

SOLIDARITE STRATEGIQUE et POLITIQUES D’ETAT. Par C. Harbulot et D. Julienne

La gouvernance mondiale existe déjà… UN DIALOGUE CRITIQUE AVEC B. BADIE

LA LITTERATURE FAIT-ELLE DE LA GEOPOLITIQUE ?

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Conférence de Bertrand Badie : Les embarras de la puissance (9 février 2014)

Conférence de Bertrand Badie : L’humiliation : une pathologie des relations internationales (6 novembre 2014)

UKRAINE. « IL FAUDRAIT PROCÉDER À UNE REFONTE DES TRAITÉS QUI RÉGULENT LA SÉCURITE EUROPÉENNE »

Interview exclusive sur l’OTAN et la guerre en Ukraine

lundi 7 mars 2022 Amélie ZIMA

Amélie Zima (1) reprend de façon détaillée l’accord OTAN/Russie de 1997. « Il y a une tendance à exagérer la place de l’OTAN dans la guerre actuelle ». Si assurément, l’alliance fait partie des griefs pour la Russie, la très grande dangerosité du moment présent relève d’une analyse systémique : principes du droit international, intégrité territoriale, souveraineté, droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, question des normes démocratiques et force d’attraction de l’Union européenne en Ukraine...
« La finlandisation quant à elle ne veut donc dire ni neutralité, ni neutralisation ». L’urgence est à la reconstruction des traités sur la sécurité européenne...

(1) Amélie ZIMA est chercheuse post-doctorale au Centre Thucydide (U. Panthéon-Assas) et chercheuse associée à l’Irsem (Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire). Autrice de L’OTAN, Paris, PUF, coll. Que Sais-Je ?, 2021.

L’Europe à nouveau confrontée à l’histoire

« IL FAUDRAIT PROCÉDER À UNE REFONTE DES TRAITÉS QUI RÉGULENT LA SÉCURITE EUROPEÉENNE »

GeopoWeb – Pourriez-vous rappeler les principes et enjeux de l’accord OTAN/Russie de 1997 ?

L’Acte fondateur a été signé en Mai 1997 à Paris. De fondateur, l’Acte a le nom, mais il ne peut être strictement considéré ainsi car Moscou avait déjà rejoint des structures de coopération mises en place par l’OTAN au sortir de la guerre froide comme le Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA devenu Conseil de partenariat euro-atlantique, CPEA) et avait participé aux missions en Bosnie aux côtés de l’OTAN. Il s’agit alors d’institutionnaliser plus étroitement la coopération en posant les modalités d’une relation stable et pérenne. L’aspect réellement novateur se situe dans la création du Conseil conjoint permanent OTAN-Russie (devenu Conseil OTAN-Russie en 2002). Cette configuration bilatérale devait servir de cadre de consultations pour toute question touchant à la sécurité des deux parties mais aussi permettre d’envisager des actions communes dans des domaines tels que le maintien de la paix, le désarmement ou la lutte contre les armes de destruction massive.

L’objectif de l’Acte fondateur est de construire « une Europe stable, pacifique et sans division, une Europe entière et libre, au profit de tous ses peuples » ainsi que de renforcer « la sécurité et la stabilité dans la région euro-atlantique ». L’Acte mentionne aussi clairement le respect de la démocratie, du pluralisme politique, des libertés civiles et l’engagement à respecter de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de tous les Etats. Par ailleurs, l’Acte précise clairement que l’OTAN ne positionnera pas d’armes nucléaires sur les territoires des nouveaux membres et qu’elle remplira sa mission de défense collective principalement par l’interopérabilité et non pas le déploiement de troupes permanentes. Le renforcement pourra cependant s’opérer en cas de menace d’agression. Cette disposition avait à l’époque inquiété les pays d’Europe centrale et orientale, qui craignaient d’être des membres de second rang, et tout un travail de réassurance avait dû être mené. Les pays membres de l’OTAN avaient souligné l’existence du parapluie nucléaire et l’importance de la clause d’assistance mutuelle (article 5) en cas d’attaque pour rassurer leurs nouveaux alliés. Enfin les deux parties n’obtiennent aucun droit de veto sur leurs affaires internes réciproques ou leurs capacités à mener des actions de manière indépendante. De fait, la Russie n’obtient pas le droit d’empêcher un futur élargissement de l’OTAN.

Cependant l’Acte n’est pas un traité juridiquement contraignant. Il s’apparente à une sorte de gentlemen’s agreement et l’enfreindre, comme l’a fait la Russie à plusieurs reprises, ne peut exposer à aucune mesure de rétorsion. Paradoxalement, lors des négociations, la partie russe voulait lui conférer ce caractère juridiquement contraignant…

GPW - Peut-on dire que l’OTAN « encercle » et menace la Russie ? Quelles sont les forces en présence sur le flanc est ?

Après l’annexion illégale de la Crimée par la Russie et le déclenchement de la guerre dans la région ukrainienne du Donbas, l’OTAN a recentré son activité sur con cœur de métier, la défense des Etats membres. En effet, Dans les années 2000, l’OTAN s’en était écarté pour des opérations à caractère expéditionnaires, comme en Afghanistan. Depuis le sommet de Varsovie en 2016, l’OTAN a mis en place une présence avancée renforcée (eFP) dans les pays baltes et en Pologne et une présence avancée adaptée (tFP) sur le flanc Sud-est, en Roumanie. L’eFP compte donc quatre bataillons multinationaux répartis entre quatre pays-membres et dont les nations-cadres sont les Etats-Unis en Pologne, l’Allemagne en Lituanie, le Canada en Lettonie et la Grande-Bretagne en Estonie. En février 2022, l’ensemble des forces de l’eFP représente 4900 soldats.

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, les pays membres ont envoyé des navires, des avions et des troupes supplémentaires sur le flanc oriental afin de renforcer la posture de dissuasion. La France joue ici un rôle important car non seulement elle envoie des centaines de troupes supplémentaires en Roumanie mais la ministre Florence Parly a fait savoir dès janvier 2022 que la France était prête à devenir nation-cadre en Roumanie, si une telle décision était prise par l’ensemble des Etats-membres. La France prendrait alors la tête d’un bataillon multinational de type eFP.

Au vu de la faiblesse numérique de ces déploiements, il est donc difficile de dire que l’action de l’OTAN conduit à un encerclement ou une sur-militarisation du flanc Est. L’Alliance insiste d’ailleurs sur le fait que ce renforcement est conforme aux traités internationaux ainsi qu’à l’Acte fondateur.
En parallèle de cette action de l’OTAN, des renforcements ont eu lieu sur une base strictement bilatérale. C’est le cas notamment avec le déploiement en Pologne de troupes additionnelles américaines, environ 3000 soldats issus de la 82ème division aéroportée. Ces troupes stationnent dans le sud-est de la Pologne, à moins de 100 km de la frontière ukrainienne et avaient été initialement envoyées pour faire face au renforcement militaire russe à la frontière ukrainienne et à al tenue d’exercices militaires conjoints entre le Bélarus et la Russie.

GPW - L’Ukraine est-elle une « petite Russie » ?

La Russie considère l’Ukraine comme une chasse-gardée, elle serait une nation sœur et son indépendance, qui résulte de la chute de l’URSS et qui a été reconnue aussitôt par les Nations-Unies, serait une erreur historique. Cela va à l’encontre du respect des principes de droit international comme l’intégrité territoriale, la souveraineté et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Depuis la chute du rideau de fer, d’autres pays ont fait un autre chemin comme la Pologne par exemple. Après la transition démocratique consécutive à la chute du rideau de fer, les élites postcommunistes ont adopté la doctrine ULB (Ukraine, Lituanie, Biélorussie). Cette doctrine a été élaborée par les dissidents Jerzy Giedroyc et Juliusz Mieroszewski, qui avaient émigré en France durant la guerre froide. Elle prône l’acceptation par la Pologne des frontières issues de l’après- Seconde Guerre mondiale, l’abandon de toute revendication sur des régions, dont l’Ukraine occidentale, qui faisait partie de son territoire jusque dans l’entre-deux guerres, ainsi que le soutien à leur indépendance et leur démocratisation. Le but était que cet espace ne soit plus un enjeu de luttes.

GPW - Le moment actuel de tensions relève-t-il d’un aventurisme poutinien ou d’une stratégie mûrie de longue date face à des démocraties « abimées », à l’affaiblissement des Etats-Unis ? Une fenêtre d’opportunité ?

La fin de l’intervention en Afghanistan a constitué une séquence négative pour l’OTAN et la concertation entre alliés, notamment car le président Biden en a pris la décision unilatéralement. On peut penser que V. Poutine a estimé que les Etats-Unis et leurs alliés étaient dans une mauvaise passe et qu’il y avait une fenêtre d’opportunité. Mais cela a eu l’effet inverse. Les lignes exprimées par le gouvernement russe, tant sur l’Ukraine que sur la démilitarisation des membres d’Europe centrale et orientale de l’OTAN sont jugées inacceptables. De fait, l’action du président Poutine n’a pas entrainé de divisions entre Alliés, mais a renforcé la cohésion et l’unité de l’OTAN.

GPW - Une certaine dissociation d’intérêts entre l’OTAN et l’U.E affaiblit-elle l’Occident ?

Le conflit actuel montre qu’il n’y a pas réellement de dissociation d’intérêts entre l’OTAN et l’UE. Les deux organisations ont condamné par le passé l’annexion illégale de la Crimée par la Russie en 2014, soutiennent la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine et ont des accords de partenariat avec Kiev. Les pays membres de l’OTAN ont décidé de renforcer la posture de dissuasion sur le flanc Est, notamment avec l’envoi de troupes par la France en Roumanie et l’accentuation de la police du ciel, avec la surveillance de l’espace aérien polonais. Par ailleurs, l’OTAN soutient la politique de sanctions mise en place par l’UE.

GPW - Fondamentalement est-ce l’OTAN, l’UE ou la démocratie qui gênent Poutine ?

Il y a une tendance à exagérer la place de l’OTAN dans la guerre actuelle. Or l’argumentaire russe autour de l’OTAN est un prétexte construit pour envahir l’Ukraine. L’Alliance atlantique n’a jamais intégré l’Ukraine dans son programme de pré-adhésion, le Plan d’action pour l’adhésion (MAP) et n’est pas garante de sa sécurité étant donné que l’article 5 de l’OTAN, la clause de défense collective, ne s’applique qu’aux Etats membres. De fait, l’argumentaire du gouvernement russe n’est pas fondé factuellement.

Il faut aussi se rappeler que le mouvement EuroMaïdan en 2013-2014 est parti du refus de l’ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch de signer un accord d’association avec l’UE au profit d’un traité avec la Russie. En proposant un accord de libre-échange complet et approfondi (AA/ALECA), l’UE est allée beaucoup plus loin dans le rapprochement. Surtout, l’UE présente un modèle normatif basé sur l’Etat de droit et les valeurs libérales et démocratiques. Par l’étendue de ses domaines d’action, l’UE peut davantage contribuer à la transformation d’un Etat que ne le pourra jamais l’OTAN. L’accord d’association de l’Ukraine avec l’UE, finalement signé par Petro Porochenko, arrivé au pouvoir après l’EuroMaïdan, a des conséquences très importantes pour le développement du pays. Cela entraîne un transfert de normes et de pratiques, le développement des échanges entre l’UE et l’Ukraine et la création d’une zone de libre-échange.

GPW - On parle parfois de neutralisation ou de finlandisation de certains pays. Ces deux termes sont-ils synonymes ?

La Finlande ne fait pas partie de l’OTAN, mais elle en est une partenaire. Helsinki rend son armée interopérable avec celles de l’OTAN, participent aux exercices militaires et a signé un accord de soutien logistique aux troupes de l’OTAN en transit ou présentes sur leurs territoires. Par ailleurs, la Finlande dispose d’une armée de 900 000 réservistes sur 8 millions d’habitants et de forces militaires conséquentes. Elle est en train d’acheter des F35 américains. et elle est un Etat membre de l’UE. La finlandisation ne veut donc dire ni neutralité, ni neutralisation. Par ailleurs, le président finlandais a lui-même estimé que la finlandisation résultait d’un contexte historique très particulier, celui de la guerre froide et qu’elle n’avait pas pour vocation d’être étendue à d’autres pays.

GPW - La crise actuelle peut-elle permettre de ressouder l’Otan et la Turquie ?

La Turquie a une position plutôt alignée sur celles des autres pays de l’OTAN. Déjà en août 2021, les autorités turques avaient participé à la Plateforme de Crimée qui est une structure créée par le président ukrainien Volodymyr Zelenski afin de protéger les droits des Tatars de Crimée, de mettre fin à l’occupation de la Crimée et de rétablir de bonnes conditions de navigation dans la mer Noire et la mer d’Azov. Par ailleurs, la Turquie a fourni l’Ukraine en drones Bayraktar, les mêmes que l’Azerbaïdjan avait utilisé dans sa guerre victorieuse contre l’Arménie. Cependant, Ankara n’a pas fermé son espace aérien aux avions russes et craint les effets des sanctions sur son économie vu qu’environ 40% de son énergie est importée de la Russie. Donc le conflit actuel n’entraîne pas une véritable prise de distance entre la Turquie et les autres pays membres de l’OTAN mais n’a pas complètement ressoudé les liens.

Conclusion : La crise actuelle peut-elle conduire à une reconfiguration de l’ordre mondial ?

Il faudrait procéder à une refonte des traités qui régulent la sécurité européenne. Le traité FNI sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, dénoncé par D. Trump et violé par V. Poutine, n’est plus opérant. Il y a un enjeu important car des missiles russes Iskander sont installés dans l’enclave de Kaliningrad et peuvent donc viser les Etats européens. De plus, le gouvernement bélarus a annoncé être prêt à héberger des têtes nucléaires russes. En effet, le statut d’état non nucléaire et neutre adopté par le Bélarus en 1990 et inscrit dans la Constitution en 1994, a été retiré du projet constitutionnel proposé par le gouvernement de Lukachenka en décembre 2021 et validé en février 2022.

La Russie a aussi quitté le traité sur les forces conventionnelles en Europe (FCE) en 2015 qui impose des limites juridiquement contraignantes à des catégories d’armements sur « les flancs » des deux anciens blocs militaires, prévoit un échange d’informations et un système d’inspections.

Ce retrait permet à la Russie de déplacer librement ses troupes sur son territoire, comme elle l’a fait cet hiver en massant ses forces à la frontière de l’Ukraine sans subir les limitations imposées. Pour restaurer la confiance et la sécurité, il faudrait donc aussi rendre plus opérant le système d’observations des exercices militaires. En effet, les exercices « Zapad » organisés par la Russie en 2017 et 2021 auraient réuni entre 60 000 et 200 000 hommes. Il y a donc une nécessité de procéder à la reconfiguration de l’ordre européen de sécurité et de défense.

Amélie ZIMA, le 7 mars 2022

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