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DOSSIER FINCANTIERI : quel avenir pour l’industrie navale européenne ?

Etat des lieux, novembre 2018

mercredi 21 novembre 2018 Etudiants Prépa HEC1

1. Dossier Fincantieri : quel avenir pour l’industrie navale européenne ? Etat des lieux, novembre 2018

A titre de rappel, l’appellation « Chantiers de L’Atlantique » désigne le plus grand chantier naval d’Europe, au premier plan dans la course au gigantisme des navires. Implanté à Saint-Nazaire, il représente un enjeu stratégique, militaire et commercial majeur pour l’industrie française.

En juin 2016, la société STX France, détenant 66,66 % des chantiers, est placée en liquidation judiciaire et lance un appel d’offre, qui voit Fincantieri, constructeur naval italien, se positionner en tant que seul repreneur crédible.
A la suite de multiples négociations, noyées au milieu des vicissitudes politiques liées aux intérêts nationaux que représente le rachat, semble se profiler en septembre 2017 une issue au dossier. Faisant fi des accords trouvés sous la présidence de Francois Hollande, Emmanuel Macron nationalise en juillet 2018 STX France, bloquant provisoirement les négociations. Le compromis trouvé consiste en un rachat par Fincantieri des parts de STX à hauteur de 50%, plus 1 % « prêté » par l’État Français sur une durée de 12 ans. Les autres actionnaires de STX France sont, à hauteur de 10 % : le groupe naval français de construction militaire Naval Group (ex DCNS), les salariés (2%) et d’autres actionnaires minoritaires (3,6%).

A ce jour, le rachat du capital pour 59,7 millions d’euros n’est toujours pas effectif, le projet étant suspendu au feu vert des autorités de la concurrence française et allemande, qui ont été jugées par l’Agence des participations de l’État, en concertation avec Bruxelles, compétentes pour traiter le dossier au niveau national.

Une arrogance industrielle française ?

Les Italiens ont trouvé extravagant le refus de l’État français du projet d’acquisition par Fincantieri de 66 % du capital. Les Italiens pointent du doigt un patriotisme économique à sens unique, les investissements français étant plutôt bien accueillis.

Des griefs antifrançais semblent alors se développer, se nourrissent du déséquilibre flagrant de la balance des investissements transalpins. Entre 2006 et 2016 selon le cabinet d’audit et de conseil KPMG, les entreprises italiennes ont racheté pour 7,6 milliards d’entreprises françaises, quand ces dernières ont racheté pour 52,3 milliards d’entreprises italiennes. Dans ces conditions, la renégociation de la part du gouvernement français de l’accord déjà conclu sous la présidence Hollande pour la reprise de STX par l’entreprise Fincantieri (contrôlée par l’Etat italien) a été vécue comme une autre manifestation intolérable d’une « arrogance industrielle française ». Une France qui ne saurait faire confiance à un partenaire italien pourtant compétent et sérieux. Cette « affaire STX-Fincantieri » a largement contribué à faire évaporer le capital de sympathie européenne que l’élection d’Emmanuel Macron sous le signe du drapeau de l’Union avait pu faire naitre en Italie.

Sous couvert de défense des intérêts stratégiques français, la gestion du dossier par Emmanuel Macron, qui en a fait une de ses priorités dès son élection, s’apparente à un manifeste paradoxal face à sa politique des champions européens. L’entrée au capital de Naval Group (12 %) alimente de nouveau cette contradiction, ambitionnant de créer avec Fincantieri une alliance franco-italienne dans la construction navale. Dans une perspective plus large, ce dossier fait écho aux fréquentes velléités françaises de prendre part à des projets de champions européens tout en souhaitant garder la main sur la gestion stratégique, comme le montre l’importance critique prise par Toulouse dans le groupe Airbus.

Une illustration des difficultés de l’Union

Nonobstant, ce cas d’espèce, où un actionnaire italien qui contrôlerait une entreprise française suscite en définitive plus d’inquiétudes qu’un actionnaire coréen, est une bonne illustration des difficultés qui ont empêché l’émergence depuis 1957 et le traité de Rome de champions industriels véritablement européens possédant une envergure mondiale.

Dans le cadre actuel de la mondialisation, pour un ancien champion national d’un pays européen, il est en effet bien plus aisé de fusionner avec une entreprise extraeuropéenne – américaine dans un premier temps le plus souvent, asiatique aujourd’hui – qu’avec une autre entreprise européenne. La concurrence est toujours plus forte a priori avec cette dernière en termes de produits, de marchés et de lieux de production, donc d’emplois. Et cela d’autant plus que la Commission européenne, dont la fonction majeure est de conforter « la concurrence libre et non faussée » au sein de l’Union, a longtemps considéré que de tels rapprochements entre entreprises européennes aboutiraient à former des géants qui bénéficieraient d’une « position dominante » dans le marché commun puis unique.

Ils seraient ainsi en mesure d’imposer leurs conditions aux consommateurs de l’Union menaçant leur pouvoir d’achat et leur bien-être, même s’ils restaient en réalité des nains à l’échelle mondiale. La Commission a cependant assoupli dernièrement sa doctrine sur ce plan, mais le mal est fait. En élargissant la perspective au-delà même des difficultés objectives rencontrées, la création de champions européens par rapprochement d’entreprises européennes de différentes nationalités réveille toujours les vieilles rivalités. En Europe, elles ne sont encore que superficiellement enfouies.

Peut-on remédier à cet échec industriel de l’Europe ?

Hormis Airbus et ArianeSpace, il n’existe de champion véritablement européen dans à peu près aucun secteur industriel. Sur le reste des marchés, les sociétés européennes sont à la remorque des firmes américaines, japonaises et désormais aussi chinoises. En ce sens, serait-il possible, malgré ces blocages structurels européens, de démarrer une véritable politique industrielle européenne ? Une nécessité urgente pour conserver ou le plus souvent retrouver une maîtrise des technologies clés de l’avenir ?

Quid alors de l’utopique Airbus des mers ?

L’idée de s’allier à l’échelle européenne dans le domaine de la construction navale n’est pas nouvelle, loin de là. Cela fait 20 ans que l’idée d’un « Airbus des mers » a émergé. Où en est-on alors aujourd’hui ?

En 2017, l’idée d’un « Airbus des mers » refaisait surface lorsque un rapprochement entre les 2 géants italiens et français, Fincantieri et Naval Group (ex-DCNS), planait dans l’air. Sur ce dossier, dit « projet Poséidon », l’Etat est directement à la manoeuvre par la voix du Ministre de l’Economie (Bruno Lemaire) et celle de la Ministre des Armées (Florence Parly). Ainsi, en septembre 2017, Bruno Lemaire se rendait à Rome pour faire avancer sérieusement le dossier avec son homologue intérieur de l’époque Pier Carlo Padoan. Seul problème, depuis cette date, le dossier est au point mort. En effet, depuis septembre 2017, plusieurs facteurs concomitants ont bousculé le projet. Changement d’une part de majorité en Italie dont découle la détérioration des relations franco-italiennes et d’autre part les oppositions venues deux autres groupes français et italiens : Thales d’un côté et Leonardo de l’autre.

D’un point du vue diplomatique, on ne peut pas dire que les relations franco-italiennes soit au plus haut ces derniers temps. Sur le plan politique tout d’abord, les personnalités d’Emmanuel Macron et de Matteo Salvini sont plutôt antagonistes. La crise migratoire n’a fait que cristalliser les tensions. Si les tensions entre E. Macron et M. Salvini sont les plus médiatisées, elles sont révélatrices de la détérioration des relations franco-italiennes dans leur ensemble.

Du côté des entreprises les relations se tendent aussi. Leonardo, second leader du secteur en Italie, ne cache pas son mécontentement et sa colère face à un hypothétique rapprochement entre Fincantieri et Naval Group. En effet, le président de Fincantieri, Giuseppe Bono, avait annoncé que Thales récupèrerait les activités stratégiques des systèmes de gestion de combat de Leonardo, provoquant alors la colère de la direction du groupe électronique italien. Au final, après être monté au créneau, le groupe électronique italien obtiendra la garantie par Fincantieri de conserver son activité.

De l’autre côté des Alpes, c’est le géant français de l’électronique de pointe Thales qui s’inquiète pour son avenir. En 2007, ce dernier avait noué une alliance avec la DCNS (maintenant Naval Group) en apportant son système de combat au constructeur naval en l’échange d’une montée dans le capital du constructeur naval (à hauteur de 35 %). Dans un futur proche, en cas de fusion, Thales et son système se retrouveraient menacés par son concurrent italien très compétitif, Leonardo. Que ce soit donc d’un côté ou de l’autre, la France et l’Italie ont toutes les deux réalisé, que toute fusion mettrait en danger leurs deux champions respectifs de l’électronique de pointe.

Ainsi, du côté italien, le projet Poséidon a paradoxalement permis de renforcer la coopération entre les deux champions nationaux Leonardo et Fincantieri. Ils ont convenu de réorganiser leur société commune Orizzonte Sistemi Navali (OSN) afin d’être plus compétitif sur un marché mondial toujours plus concurrencé. Du côté français, l’Etat n’entend pas céder Thales aux italiens. Pour preuve, l’Etat n’a jamais demandé à Thales de se retirer du capital de Naval Group. Les deux présidents de Fincantieri et de Naval Group, Giuseppe Bono et Hervé Guillou, restent quant à eux néanmoins convaincus que la construction navale européenne ne pourra survivre que si elle s’unie.

Si une alliance entre les deux groupes est bien née en octobre 2018 à la suite de l’annonce de la création d’une société commune contrôlée à parts égales, on est bien loin de l’apothéose qu’avait imaginé Bruno Lemaire et l’ensemble du gouvernement français il y a un an. L’alliance franco-italienne dans la construction navale est dans l’impasse.

Matteo Boucherie et Matéo Garbe, Prpe Hec, novembre 2018

2. Eté 2017 : l’Etat français à la manoeuvre dans le dossier STX/Fincantieri. Novembre 2017

L’affaire STX a subi un revirement de situation le 27 juillet 2017. STX France est une société de construction navale de la branche française de STX Europe. Elle comprend notamment les chantiers de l’Atlantique, partie intégrante du patrimoine maritime français. En effet le nouveau gouvernement a décidé de nationaliser temporairement STX France, dans l’attente d’un accord plus équilibré avec Fincantieri, société de construction navale italienne, dans les secteurs des navires de croisière, de transport et militaire. Pour rappel, Fincantieri était le seul repreneur européen à s’être manifesté après la mise en vente de STX France par la maison mère sud-coréenne placée en redressement judiciaire. Le gouvernement du Président Hollande était parvenu à trouver un accord en avril 2017, avec l’idée qu’il valait mieux céder des parts à un investisseur européen plutôt qu’à une entreprise chinoise. 48% des parts étaient accordées à Fincantieri et 45% à l’Etat français. Cependant, le gouvernement de Macron a rapidement voulu renégocier cet accord, jugé trop favorable aux Italiens. Ainsi, avec cette nationalisation, la reprise a été bloquée.

Dès son arrivée au pouvoir, le nouveau président de la République, Emmanuel Macron a décidé de revenir sur le compromis négocié entre Mr. Hollande et les Italiens. Cette décision fait suite au refus de Fincantieri de partager le capital de STX à 50-50. Le nouveau gouvernement ne voulait pas céder et affirmait être prêt à exercer le droit de préemption de l’Etat sur STX si Fincantieri ne se contentait pas des 50%. L’objectif était d’éviter que les Italiens ne deviennent actionnaire majoritaire et ainsi perdre les chantiers navals français. La nationalisation a donc eu lieu permettant d’engager de nouvelles négociations.

Nous pouvons alors nous demander ce qui justifie une décision exceptionnelle comme cette nationalisation temporaire des chantiers navals STX de Saint-Nazaire. En effet, ce dossier montre l’intervention de l’Etat dans l’économie et a d’ailleurs été directement traité par l’Elysée qui estimait que ce dossier, relevant du patriotisme économique devait être négocié d’Etat à Etat.

Plusieurs raisons ont poussé le gouvernement à revoir cet accord. Tout d’abord, les chantiers de l’Atlantique ont une activité très sensible à la conjoncture mondiale. Certes leur carnet de commande est rempli pour 10 ans, mais que va-t-il se passer ensuite ? Que va-t-il se passer si une chute de l’activité est observé après cet accord ?

L’Etat français a en effet eu peur que les Italiens délocalisent, ce qui engendrerait bien évidemment une perte d’emplois en France. L’enjeu est donc de garantir le maintien en France des compétences et du savoir-faire acquis par les chantiers de l’Atlantique. De plus, il semblerait que Fincantieri ait des relations étroites avec la Chine, ce qui fait d’autant plus craindre un transfert de savoir-faire ou d’activité en cas de conjoncture défavorable en France. Un des enjeux de cet accord est donc celui de souveraineté stratégique, les chantiers de Saint Nazaire sont en effet le seul site capable de construire de grandes coques pour des navires militaires. Ils sont donc nécessaires à la France en cas de conflit armé.

Ainsi, c’est l’industrie de la défense française qui est en jeu dans ce dossier, d’où son caractère hautement stratégique. Les pouvoirs publics voulaient donc que la France garde un accès privilégié à STX. Cette intervention rend donc compte des intérêts non seulement économiques mais également stratégique liés aux chantiers navals STX.

Le but était donc de nationaliser le temps de renégocier, dans l’idée d’un partage 50/50 avec les italiens. Il s’agirait d’abaisser les parts de Fincantieri et de faire entrer les 2 plus gros clients des chantiers de l’Atlantique dans l’accord. Cette décision n’a pas fait l’unanimité, certains avancent que l’accord négocié sous Hollande n’était pas si mauvais, il aurait bel et bien permis de construire un groupe européen leader pour lutter contre la concurrence, notamment chinoise. Ainsi, sommes-nous face à un coup politique de Macron ? Pour certains, cette nationalisation permettrait au nouveau gouvernement d’attirer la sympathie des Français, après des dossiers difficiles qui ont déchainé l’opinion publique, comme la baisse des APL.
D’un autre côté, on peut aussi y voir le signe qu’ E. Macron a bien entendu les travailleurs des chantiers, et a pris en compte les intérêts de la préservation des entreprises et des emplois français.

Le dossier STX ne témoigne pas seulement d’un interventionnisme économique certain, mais aussi d’une volonté d’Emmanuel Macron de s’imposer face à ses partenaires notamment européens. Effectivement, le dossier STX, plus qu’un simple rachat, était véritablement un conflit avec l’Italie qui dénonçait justement ce « patriotisme économique français ». Les nouvelles négociations ont donc été une manière pour le nouveau gouvernement d’imposer ses vues et de s’affirmer sur la scène européenne. Cette nationalisation a été évidemment très mal perçue en Italie, tout comme les renégociations.

Mais un compromis entre Français et Italiens est enfin trouvé fin septembre 2017. Fincantieri obtient 50% des parts de STX France et l’Etat français 34,4%. Ce qui fait toute la différence de l’accord est le prêt de 1% des parts par la France à Fincantieri pendant 12 ans. Ainsi Fincantieri obtient la majorité du capital et la direction de l’entreprise. Cependant la France est en droit de reprendre son prêt ou d’exercer un droit de véto sur la nomination du PDG en cas de divergence. C’est donc un moyen pour l’Etat français de conserver la main sur le dossier STX et d’assurer une stabilité économique et salariale puisqu’il s’est engagé à vérifier l’absence de plan social et le respect du plan d’embauche sur 3 ans. De son côté, Fincantieri a garanti l’absence de transfert de technologie ou de savoir-faire hors de l’Europe. En cas de non-respect des engagements, la France récupèrerait le contrôle des chantiers navals de Saint-Nazaire.

Pour E. Macron, cet accord avec Fincantieri est un « accord gagnant-gagnant ». Fincantieri est en effet gagnant car c’est bien cette société qui va diriger -en en détenant la majorité des parts - le groupe STX. La France peut aussi être considérée comme gagnante car il n’y aura pas de transferts de charges ou de technologies au chantier de Saint-Nazaire, considéré comme un véritable enjeu stratégique pour le pays. De plus, elle se garde le droit de retirer le 1 % supplémentaire prêté à l’Italie, ce qui lui laisse un contrôle en cas de problème. Il a aussi été spécifié qu’en cas de réelles difficultés, Fincantieri se verrait dans l’obligation de revendre ses parts à la France, la laissant alors seule au contrôle de STX France. Les salariés de Saint-Nazaire peuvent eux aussi souffler, les 7000 emplois semblent protégés par des engagements de Fincantieri. Il faut cependant rappeler que la France voulait au départ être sur un pied d’égalité total avec l’Italie en se partageant 50/50 STX France. Si le chef de l’Etat se déclare satisfait des accords, on peut constater que c’est la France qui a fini par céder à la volonté italienne d’obtenir 51% des parts.

Les autres actionnaires de STX France sont, à hauteur de 10%, le groupe naval français de construction militaire Naval group (ex DCNS), les salariés ont quant à eux 2% des parts et 3,6% sont partagés entre d’autres actionnaires minoritaires. Le Conseil d’administration de STX France est composé de 4 administrateurs nommés par Fincantieri, 1 par Naval group et 1 par les salariés. Après ce rachat, tous ont l’ambition de créer un leadership européen à vocation mondiale.

La conclusion provisoire de l’affaire STX révèle un certain paradoxe de l’industrie française. En trouvant un accord, l’Italie et la France montrent leur véritable volonté de créer un groupe européen fort et lié, un champion mondial dans le naval, notamment face à la Chine ou aux Etats-Unis. Mais la confiance entre les deux Etats reste limitée, et la lutte à laquelle ils se sont adonnés pendant plusieurs mois montre bien un nationalisme toujours très présent et défensif.

Ainsi, on peut se demander si le front commun défendu par l’Italie et la France le 27 septembre 2017 va durer. Il est impossible de dire si les deux partis respecteront les promesses faites et si les relations franco-italiennes réussiront à retrouver l’élan nécessaire pour oublier les contentieux de cet été.

F. Noguero, L. Jaillardon, A. Jeunot, Prépa HEC, Lyon

3. STX et les Chantiers de l’Atlantique : bref historique

La place du groupe dans le marché mondial, ses activités, les savoirs faire, ses concurrents internationaux. Le Chaebol propriétaire, le parcours des rachats, le site français. Faut-il mettre en oeuvre le patriotisme économique pour STX et les Chantiers de l’Atlantique ?

Le chaebol STX Sté mère a été crée en 1976. Il est présent dans l’industrie, la construction navale et le commerce international pour les minerais, la construction, les énergies fossiles et renouvelables. Le groupe possède neuf filiales dont une européenne (STX Europe). En 2004, création d’Aker Yards, un groupe norvégien de construction navale en France. En 2008 : rachat hostile d’Aker Yards par STX qui en fait STX Europe. STX France : en 1955 : création d’Alstom Marine. De 1976 à 2006, Alstom est le principal actionnaire. En 2006, Alstom Marine est racheté par le groupe norvégien Aker Yards, lui même racheté par STX en 2008. Avant la récente recomposition du capital, l’État français détenait 33,34 % des actions (minorité de blocage imposée par M. Sarkozy en 2008), STX Europe possédait les 66,66 % restants.

• Les Chantiers de L’Atlantique

Il s’agit du nom donné au chantier de construction navale implanté à Saint-Nazaire, en France. Il y a actuellement près de 2660 employés en France sur ce chantier. Les chantiers de l’Atlantique sont des leaders du domaine, au premier plan dans la course au gigantisme des navires. Saint-Nazaire est une référence sur le marché des paquebots de croisière (pour deux principaux clients : MSC Croisières et Royal Caribbean). Ils ont la capacité de construire les plus grands navires du monde (des gabarits hors d’atteinte pour Fincantieri) d’où l’enjeu hautement stratégique de l’acquisition.). Les Chantiers de l’Atlantique font partie intégrante du patrimoine industriel et naval français. C’est le plus grand chantier naval d’Europe et l’un des plus grands dans le monde. Des centaines de navires civils et militaires en sont sortis, véritable fleuron de l’industrie française. On comprend alors que l’avenir des Chantiers de l’Atlantique a un intérêt stratégique pour l’ÉCONOMIE française et la DÉFENSE NATIONALE.

• Le rachat par Fincantieri

STX est alors le 4ème constructeur coréen. Mais le chaebol connaît cependant un fort ralentissement dont les causes sont multiples : ralentissement de l’économie, chute des cours du brut, mais aussi, concurrence des constructeurs chinois qui ont de meilleurs marchés. A tout cela, s’ajoutent les problèmes de gestion. En juin 2016, la Sté mère STX est placée en redressement judiciaire. STX France est officiellement mis en vente le 19 octobre par la justice sud-coréenne qui lance un appel d’offre. En janvier 2017, Fincantieri, un constructeur de navires civils et militaires est le seul candidat à avoir déposé une offre. Il s’impose comme le repreneur des 66 % détenus par STX Europe pour les chantiers de l’Atlantique.

• Un rachat qui suscite des inquiétudes

Fincantieri pourrait être tenté de transférer en Italie une partie des commandes (le carnet de commande de Saint-Nazaire est plein jusqu’en 2026 soit 14 navires pour une valeur de 12 milliards d’€). Surtout des accords liant Fincantieri à des chantiers navals chinois incluent des transferts de technologie (alliance avec le chinois CSSC) d’où le risque d’un cheval de Troie chinois. On comprend alors le refus catégorique de l’État d’une participation majoritaire de Fincantieri dans le capital des Chantiers de l’Atlantique. Un accord de principe est trouvé début avril avec l’État français qui envisageait la nationalisation temporaire de l’entreprise. Après les négociations, l’État français conserve 33,3 % du capital (minorité de blocage), ses droits de préemption, son droit de veto. Cet accord a débouché en outre sur des engagements concernant le maintien de l’emploi et la pérennité du site. DCNS (propriété de l’État-actionnaire) obtient 12 % du capital. Fincantieri en obtient 48 % du capital, 6,66% revenant à un partenaire italien (CRTrieste).
Le droit de veto permet à l’État de s’opposer à une éventuelle réduction de l’activité des Chantiers, ou bien aux transferts de savoir-faire, et à toute mesure qui serait contraire aux intérêts français en matière de défense nationale... Cette affaire a fait beaucoup de bruits, des candidats à la présidence (M. Mélenchon, M. Fillon) et les syndicats désiraient une nationalisation temporaire. Le contexte de l’époque est celui du sauvetage d’Alstom-Belfort par l’État.

• Les ambitions de Fincantieri

Fincantieri a la volonté de créer un AIRBUS DES MERS. En effet, à la suite de l’acquisition de STX France, cette firme est présente dans tous les segments de la production de navires. Fincantieri constitue désormais le premier GROUPE EUROPÉEN de construction navale civile et militaire, le 6ème à l’échelle mondiale. C’est cependant très utopique.

• SYNTHÈSE

Il est intéressant de savoir que Fincantieri est contrôlé à 75 % par l’État italien. Les Italiens ont trouvé extravagant le refus de l’État français face au projet l’acquisition par Fincantieri de 66 % du capital. Les Italiens pointent du doigt un patriotisme économique à sens unique, les investissements français étant plutôt bien accueillis par eux mêmes. Ce chantier est considéré comme un instrument de primordial de la souveraineté navale française. D’où l’arrivée de DCNS dans le capital des Chantiers de l’Atlantique. DCNS, qui est un acteur majeur dans l’industrie navale militaire française a ainsi accès aux chantiers de Saint-Nazaire pour la construction de navires militaires de grande taille (porte-hélicoptères de type Mistral ou même les porte-avions). On peut considérer que les intérêts stratégiques sont préservés. Un certain patriotisme économique a été mis en œuvre pour les Chantiers de l’Atlantique. L’État français a posé ses conditions et Fincantieri a du s’incliner.

O. Diss, A. Slama, F. Ousalem, Prepa HEC, juin 2017

Début juin 2017. Le Président Macron souhaite limiter sérieusement le poids de l’actionnaire Fincantieri afin de rassurer les syndicats et élus locaux qui craignent des transferts de charge en Italie, voire en Chine. L’Etat ne veut pas que le groupe de G. Bono devienne majoritaire au Conseil d’Administration. L’idée serait de faire entrer dans le capital (au niveau de 10 %), deux gros clients des Chantiers (les armateurs italiens MSC et américain Royal Caribbean)

SOURCES

http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/09/27/stx-macron-invente-la-privatisation-a-l-elastique_5192124_3234.html
https://www.capital.fr/economie-politique/reprise-de-stx-un-accord-gagnant-gagnant-dit-macron-1246592
http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2017/09/30/le-et-en-meme-temps-de-macron-en-version-industrielle_5194052_3232.html?xtmc=stx&xtcr=7
http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/les-dessous-de-la-prise-de-controle-de-stx-france-par-fincantieri-752047.html
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/nationalisation-de-stx-coup-politique-ou-strategie-industrielle-745914.html
http://www.latribune.fr/economie/france/attractivite-le-dossier-stx-symbole-du-mal-francais-745494.html
http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/msc-et-rccl-l-etrange-choix-d-emmanuel-macron-pour-stx-728794.html
http://www.liberation.fr/france/2017/09/27/stx-entre-paris-et-rome-la-bataille-navale-est-terminee_1599387
http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/09/27/stx-macron-invente-la-privatisation-a-l-elastique_5192124_3234.html
http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/07/26/chantiers-de-saint-nazaire-l-ultimatum-de-l-elysee-a-l-italie_5165170_3234.html
http://www.leparisien.fr/economie/stx-la-piste-de-la-nationalisation-des-chantiers-navals-se-renforce-27-07-2017-7160418.php

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